La politique, "c'est une vie et une pratique"

Alors qu’actuellement dans la majorité comme dans l’opposition, et dans les media bien sûr, on s’interroge sur cette période où le président Sarkozy semble avoir perdu la main et accumule des revers, un chapitre de la magistrale « Histoire de la sexualité », tome 3 : « le souci de soi », de Michel Foucault retient toute notre attention.

 

Dans cette partie intitulée « Le jeu politique » (p112 et s.), Michel Foucault montre qu’au début de notre ère, « des transformations politiques importantes ont lieu dans les mondes hellénistique et romain qui ont provoqué une problématisation de l’activité politique » qu’il caractérise par trois tendances.

<Une relativisation.

 La politique, « c’est une vie et une pratique, à laquelle on ne peut se livrer que par un choix libre et volontaire », écrit Plutarque (moraliste grec du 1^er siècle). Le fondement entre soi même et l’activité politique, c’est essentiellement un acte personnel. S’appuyant sur Aristote et Sénèque (écrivain et philosophe romain du 1^er siècle), Foucault rappelle qu’ « on est toujours d’une certaine façon gouvernant et gouverné ». Ainsi notre président est-il en partie « gouverné » par l’Europe, par les Etats Unis, mais aussi par ses amis…

<Activité et acteur moral

Les grecs savaient qu’une cité ne saurait être heureuse et bien gouvernée qu’à la condition que ses chefs soient vertueux. Et Plutarque disait « c’est en sachant bien se conduire que le chef saura conduire, comme il  faut, les autres ». Et, « la rationalité du gouvernement des autres est la même que la rationalité du gouvernement de soi-même ».

Michel Foucault résume : « il apparaît que l’art de se gouverner soi-même devient un facteur politique déterminant ». Toute une élaboration de soi par soi est nécessaire pour ces tâches qui seront d’autant mieux accomplies qu’on ne s’identifie pas de façon ostentatoire aux marques du pouvoir, écrit Foucault en reprenant Marc Aurèle.

<Activité politique et destinée personnelle

Les anciens rappelaient avec force la précarité inhérente à l’exercice du pouvoir. Deux formules de Sénèque disent l’essentiel : « Sans attendre que la fortune nous interrompe à sa guise, il faut arrêter nos progrès longtemps avant l’instant fatal » (et si Henri Proglio et tant d’autres avaient lu cela… !) et plus loin : « De sa moralité chacun est l’artisan ; pour les emplois, le sort en dispose ».

Voici comment Michel Foucault relève « la difficulté dans la manière dont l’individu peut se constituer comme sujet moral de ses conduites et les efforts pour trouver dans l’application à soi ce qui peut permettre de s’assujettir à des règles et de finaliser son existence ».

On peut mieux comprendre comment en deux ans et demi, mélangeant vie publique, vie privée, en se croyant tout permis, fausses promesses, arrogance, provocation, en s’imaginant infaillible, véritable homme providentiel, capable de dominer le temps et de forcer vainement l’allure de tout un peuple, sans même le respecter, Nicolas Sarkozy a dilapidé l’essentiel de ses forces et perdu la confiance de la majorité des citoyens..

On disait que son pire ennemi était lui-même ; et si en plus, la gauche s’y met, alors…

PF